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Trois lettres de Roger Martin du Gard à Robert de Saint-Jean sur ses convictions et ses engagements

Roger Martin du Gard (Neuilly, 1881/1958)
Romancier, auteur du roman-fleuve Les Thibault (1920-1940), prix Nobel de littérature (1937).

Type de document : lettres autographes signées

Nb documents : 3 - Nb pages : 6 - Format : In-8

Lieu : Bellême et Cassis

Date : 29 mars - 5 mai 1933

Destinataire : Robert de Saint-Jean (1901-1987), écrivain et journaliste, compagnon de Julien Green

Etat : bon

Description :

Intéressantes lettres, écrites au moment de l'arrivée d'Hitler au pouvoir, sur ses convictions et ses engagements.

Dans une première lettre, il remercie Robert de Saint-Jean de son article sur Vielle France. "Votre perspicacité a su lire entre les lignes, et lire très juste. Nous ne nous connaissons pas et vous me semblez très bien me connaître [...]".

Puis il répond à une sollicitation de Robert de Saint-Jean, à inscrire son nom au bas d'une pétition. "L'intérêt que je porte à votre cause, comme dit votre circulaire, ne fait pas question. J'ai depuis trop longtemps pris position contre l'antisémitisme pour que mes réactions devant la guerre de religion menée en Allemagne aient besoin d'être formulées. Mais, je vous l'avoue, j'ai une grande répugnance à souscrire à ces sortes de manifestes violents, dont tous les termes me paraissent outrés et empruntés fâcheusement au vocabulaire de meeting. Je crois notamment que dans le cas actuel, ces protestations injurieuses, farcies d'épithètes infamantes, sont plus nuisibles qu'utiles à la "cause" qu'il s'agit de défendre et aux victimes auxquelles il convient de porter secours. Les mots importent peu, me direz-vous. C'est bien possible. Mais je suis un écrivain, et pour moi les mots comptent. Peut-être ceci est-il la preuve que je ne suis pas un homme d'action. En tous cas, j'ai trop l'habitude de peser mes termes, pour pouvoir signer, en toute adhésion, des professions de foi dont j'approuve la tendance généreuse mais dont je désapprouve la teneur [...]".

Dans une troisième lettre, il réaffirme sa position. "[...] Au fond, ce sont bien moins des manifestations d'humanité que de politique. Je ne veux pas faire de politique. Je ne veux pas mettre le petit doigt dans la politique. Chacun sa compétence, ses capacités, son métier. Il faut tâcher de ne faire que ce qu'on sait faire à peu près bien. Et c'est, à tout prendre, la meilleure façon de servir la collectivité, de remplir son office social. Nous vivons à une époque où, moins que jamais, le lendemain est prévisible. Ce que je vous écris là, qui sait si demain je ne le renierai pas, qui sait si demain je ne serai pas entraîné, moi aussi, à laisser ma plume, pour combattre et agir selon mes convictions? [...]"

Une lettre à en-tête de l'hôtel Lutetia. Une enveloppe jointe.

Vendu