REF: 11291

Précieux manuscrit du XIVe de La Consolation de Philosophie, de Boèce

Type de document : manuscrit

Nb documents : 1 - Nb pages : 4 cahiers plus ou moins complets (24 feuillets formant 47 pages grand in-folio) - Format : Grands feuillets de peau de vélin (45 x 32,5 cm).

Lieu : S.l.

Date : Seconde moitié du XIVe siècle.

Destinataire : Sans

Etat : Quelques défauts à certains feuillets (taches, quelques rares trous), deux sont tronqués.

Description :

BOÈCE. [Consolation de Philosophie]. Manuscrit. En français.

Manuscrit inachevé de la Consolation de Philosophie de Boèce.

Manuscrit inachevé (et incomplet) du XIVesiècle, contenant certaines parties du second livre (essentiellement) et du début du troisième (sur cinq) de la Consolation de Philosophiede Boèce.

Le texte de Boèce occupe la partie centrale des pages, il est entouré de la glose (commentaires) écrite sur deux colonnes, en plus petits caractères ; pour quelques pages où ne figurent pas de glose, le texte de Boèce occupe la totalité de la page. Une place a été laissée pour la réalisation de lettrines, qui ne furent jamais exécutées (seules certaines majuscules sont rehaussées au rouge et à l’ocre, et les titres de chapitres rubriqués à l’encre rouge). En effet, en dépit de l’extrême application du copiste, celui-ci fit plusieurs omissions (en plus des fautes signalées en marge par une main correctrice) et des erreurs de pagination irrattrapables. On ne doit donc pas s’étonner que ces pages n’arrivèrent pas jusqu’aux mains d’un enlumineur.

Nous avons ici un rare exemple de « brouillon » médiéval de copiste.

Chaque livre de la Consolation est composé d'une succession de passages en prose et en vers (appelés mètres dans notre manuscrit). Les 20 premiers feuillets forment un texte continu du livre II, de la fin de la 1èreprose au début de la 8e, et du début de la 1èrepoésie à la fin de la 7e(avec un manque entre les folios 3 et 4 contenant la fin de la 2eprose, la 2epoésie et le début de la 3eprose). La 5epoésie a été tronquée par erreur par le copiste de plusieurs vers. Il manque en outre plusieurs folios entre le 18 et 19 contenant la fin de la 6eprose (qui est, autre erreur du copiste, sur le demi-folio qui suit le n°22, qui ne s’insère pas dans ce cahier) et la 6epoésie. Il manque enfin, entre les folios 19 et 20, la fin de la 7eprose et le début de la 7epoésie, mais que l’on retrouve sur un folio séparé, qui contient une grande partie de la 7eprose et sa fin. Figure également sur un feuillet séparé, écrit du recto seul, la fin de la 8epoésie du livre 2. Le dernier feuillet contient le début du livre 3 (début de la 1èreprose). Un détail précis du contenu de chaque feuillet est joint.

Essai d’attribution :

Jean de Meung est le plus célèbre auteur du Moyen-Age à avoir traduit Boèce. La comparaison des textes nous permet d’affirmer qu’il n’est point l’auteur de celui-ci, qui est postérieur, du XIVesiècle. Il est difficile de connaître avec certitude son identité car Léopold Delisle qui, en 1873, a étudié 47 manuscrits français de Boèce de la Bibliothèque Nationale, a reconnu 8 traductions différentes anonymes.

Toutefois si l'on se rapporte à celle qui eut le plus de succès, éditée par Glynnis M. Cropp et analysée dans Romania 2008 (Persée), nous constatons que la cinquième poésie du second livre citée fragmentairement présente le même texte que notre manuscrit.

Bons furent cil du premier temps                           (cil modernisé ici en ceulx)

Qui n'avoient fors que les champs ...

 

Nous avons ici - d'après cet article - la seconde traduction en prosimètre de Boèce dans la littérature française, venant après Jean de Meung. Ce texte très connu est conservé par 65 manuscrits de différentes époques, mais seuls ceux de la seconde moitié du XIVesiècle, contiennent les gloses comme le nôtre.

Le traducteur de Boèce est nécessairement un autre personnage que son commentateur. Quelques détails permettent de cerner ce dernier tant soit peu : il connaît et cite tous les classiques latins : Cicéron (Tulle), Virgile, Sénèque, Ovide, Horace, jusqu'à Isidore de Séville. En spécialiste de la prosodie latine il est le seul des éditeurs de Boèce de son temps à corriger un vers (dans le latin original) pour le rendre régulier vis à vis de la métrique, et nous en avertit au folio 1 verso : Et est asçavoir que le pénultime et le derrain ver sont communément en tous livres mal escrips en ceste manière Magnumque suis ostentum monstrat. Il le corrige ainsi : Magnum suisque monstrat ostentum.

Au folio 4, après avoir parlé des harangues de triomphateurs à Rome, il dit : Tel sermon aussy est maintenant fait des bacheliers qu'on doit maistrisier en aulcune faculté. Notre auteur est un universitaire assurément, et vraisemblablement parisien.

Au folio 17 pour illustrer une considération de Boèce sur l'insignifiance de la terre dans l'univers, il développe en entier une démonstration de Ptolémée prise dans l'Almageste, avec figure géométrique, soit en résumé : si le rapport du rayon du ciel au rayon de la terre était une grandeur finie, nous ne pourrions pas voir toute la moitié du ciel ; or l'expérience contredit la conclusion, donc le ciel est infini. Il cite l'Almagesteplusieurs fois encore. Notre auteur est donc versé en astronomie : à cette époque s'il faut nommer un seul universitaire aussi savant en littérature qu'en science, on doit se tourner vers Nicolas Oresme. Plusieurs indices plaident en ce sens, en particulier des similitudes de vocabulaire :

Voici d’ailleurs ce que dit Charles Sorel, en 1667, dans sa Bibliothèque française : (p.195) La plus ancienne traduction qu'on ait remarquée, est de la Consolation de la Philosophie faite par Boèce, laquelle a esté traduite de Latin en François, par Jean Clopinel dit de Meun  [...] Je ne sçay point d'autre traducteur de marque jusques à Nicolas Oresme précepteur du Roy Charles V qui traduisit la Bible, le Livre du ciel et du Monde d'Aristote, avec ses Politiques, le livre des remèdes de l'une et l'autre fortune, fait par Pétrarque ...

Remerciements à Daniel Christiaens pour son précieux concours.

Manuscrit réglé et rubriqué. Encres brune et noire sur peau de vélin, avec rehauts d’encres rouge et ocre.

Vendu