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Quatre belles lettres du dandy Conrad Moricand évoquant Kisling, Zborowsky et Max Jacob

Conrad Moricand (Paris, 1887/1954)
Dandy, mécène, illustrateur, il est l'ami des écrivains et des artistes (Max Jacob, Pablo Picasso, Moïse Kisling, Henri Michaux, Henry Miller). Il est également astrologue et a publié des ouvrages ésotériques. Il meurt ruiné. Pseudonyme de Claude Valence.

Type de document : lettres autographes signées

Nb documents : 4 - Nb pages : 10 - Format : In-4

Lieu : Chougny-Vandoeuvres (Suisse) et Saint-Tropez

Date : 1921-1922

Destinataire : Marcel Mouillot (1889-1972), peintre.

Etat : Quelques pliures et rousseurs, manque marginal au dernier feuillet.

Description :

Ces quatre belles lettres du mythique dandy Conrad Moricand, au peintre Marcel Mouillot, offrent un rare témoignage de la personnalité fantasque de ce fils d'aristocrates suisses, mécène, illustrateur et astrologue, ami de Pablo Picasso, Max Jacob, Henri Michaux, et plus tard, d'Henry Miller, à qui il inspira Un Diable au Paradis et qui l'invita à Big Sur.

«Excuses, délices et orgues. J'ai tout du dégueulas [sic]. Vous m'avez comblé depuis mon départ : un charmant petit poème en prose et ce mirobolant chapeau équatorial, objet de nos convoitises. Je me décide seulement aujourd'hui à vous remercier. C'est un peu dégoûtant et j'espère que vous ne m'en voudrez pas.» Il évoque ses amis ; ainsi : «Distraction de 24h cependant l'autre jour en allant voir Kisling et [sa femme] Renée qui sont à 2h1/2 d'ici en auto à la chapelle d'Abondance - un petit pathelin [sic] perdu où j'ai "gelé" au fond du val d'Abondance derrière Thonon. Les Zborowsky y sont également ce qui ne relève pas la température. Kiki en grand progrès travaille comme un nègre, m'a donné l'impression pour la première fois peut-être d'un type capable d'interpréter la montagne, cette chose écrasante et trop belle, mélange de puissance et de douceurs. Il ne subit en aucune façon ce malaise que la montagne * [en marge : * en Suisse, la Nature manque absolument de savoir-vivre : les montagnes ne savent pas garder les distances. (un de mes "hoquets")], en tant que peintre, m'a toujours donné à moi et à beaucoup de mes amis.» Il parle également de s'installer à Saint-Tropez : «Business est de plus en plus business, c'est-à-dire une saloperie et une simple question de gros sous m'obligera d'ici quelques jours à rallier directement St Tropez. A part, évidemment le plaisir de retrouver quelques copains [...] et le Salon d'automne que j'aurais voulu voir, je me console en somme sans grand effort. Paris devient de plus en plus un capharnaüm impossible où l'on rencontre de tout sauf ce qu'on aimait à y voir ou à y retrouver. Et c'est triste quand on aime encore, malgré tout, cette belle fille. On ne voit déjà plus que son maquillage. Dans très bientôt, ce ne sera qu'un souvenir. Un de plus. Aussi Vive le Var Vive le Var & St Tropez & le Pilon.» Parfois, le ton est plus sombre, laissant préfigurer les difficiles années à venir : «Novembre dégueulas [sic], Novembre-Laforgue-Dégueulando-Cataplasme me tarabuste, me fout la crève (pour changer) me rend vaseux et on ne peut moins comestible.» Ou encore : «Vous êtes le plus "charmant" des amis. Vous continuez à comprendre sans le moindre dictionnaire ce que j'aurais tant de mal moi-même à vous traduire : une existence de damné que je parviens si difficilement à dissimuler.» Il garde toutefois son humour de dandy : «Je me laisse pousser la barbe (détail ridicule), "mais tout à son importance..." ajouterait également Max Jacob.»

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