Proudhon tente d’arbitrer une brouille entre ses grands amis, le peintre Elmerich et le docteur Maguet
Pierre Joseph Proudhon (Besançon, 1809/1865)Belle lettre de Proudhon, qui tente habillement et avec élégance, de réconcilier deux amis après une vive brouille :
"Mon cher Elmerich. On ne peut être plus affecté que je le suis de votre rupture avec Maguet, d’autant que je pense qu’il était possible d’amener les choses à composition, si dès le premier jour vous aviez pu vous entendre avec lui…
Maintenant que vous dirai-je ? Avec votre bonne foi comme, bonne foi que Maguet lui-même ne révoque pas en doute ; je dirai même, avec la lettre de lui que vous m’avez communiquée, il m’est impossible de ne pas croire à la sincérité de votre affirmation, quand vous dites avoir reçu l’ordre positif d’exécuter les quatre portraits. D’autres part, Maguet prétend que vous avez mal saisi sa pensée, que vous avez mis trop de hâte dans cette exécution, que vous eussiez tenu le tenir au courant etc. Et quand Maguet, dont la loyauté est au-dessus de cette responsabilité mesquine, affirme pareille chose, je vous avoue que je ne puis m’empêcher de croire à sa sincérité, autant qu'à la vôtre. Telle est donc ma position entre vous, que je ne puis réellement, dans une affaire pour moi, toute de conscience, vous donner tort, à l'un ni à l’autre ; je ne puis que déplorer le malentendu, qui, et quelque côté qu’il existe, à amené la brouille de deux amis.
Je ne vous demanderai pas ce qui, de votre part, a pu provoquer chez Maguet une parole aussi dure que celle que vous m’avez montrée dans sa dernière. Je la regrette, cette parole, pour lui, comme pour vous ; et je voudrais qu’il la retirât ou l’expliquât. Ce serait peut-être la seule porte de réconciliation ouverte entre vous : je me propose de le lui dire à lui-même ; et si il y a lieu, je vous engage de toutes mes forces à vous en contenter. Maguet vous aime ; et je vois trop par vos paroles, ce qu’il en est de vous. Il serait désolant que cette crise passée, les choses en restassent là. Bonjour, mon cher ami, et comptez sur mon amitié. À vous de cœur, P J. Proudhon".
Proudhon fut très proche du médecin Alexandre Maguet à partir de 1854, année où il faillit mourir du choléra, jusqu’à sa mort en janvier 1865.
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