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De prison, le révolutionnaire Gustave Flourens dénonce les agissements de la police de Napoléon III

Gustave Flourens (Paris, 1838/1871)
Militant révolutionnaire et anarchiste, membre de la Libre pensée, il participe à l'insurrection crétoise, est emprisonné sous le second empire, et devient un familier de Karl Marx. Il est l'un des organisateurs des soulèvements du 31 octobre 1870 et du 18 mars 1871, participe activement à la Commune, devient général des Communards et est tué par les Versaillais lors de la désastreuse offensive des Communards du 3 avril.

Type de document : lettre autographe signée

Nb documents : 1 - Nb pages : 4 - Format : In-8

Lieu : [Paris] "Maison d'arrêt de Mazas"

Date : 11/04/1869

Destinataire : [Emile de Girardin (1802-1881], journaliste]

Etat : en partie insolée (brunissures)

Description :

Longue et très intéressante lettre de Gustave Flourens, incarcéré de manière préventive pour son opposition politique au second Empire. Il demande à son ami Émile de Girardin de publier intégralement cette lettre dans La Liberté, journal que ce dernier a acquis trois ans plus tôt.

"Voici mon dix-septième jour de prison préventive! [il y restera trois mois]

J'ai été arrêté le vendredi saint, 26 mars, sur le Boulevard Rochechouart, au moment où je me rendais à la réunion qui devait y avoir lieu". Ses deux amis Ferré et Pellarin ont subi le même sort. "Le délit dont je suis inculpé, ainsi que mes deux assesseurs, est d'avoir continué à tenir ces deux réunions, malgré leur dissolution prononcée par les commissaires de Police.

Vis à vis du rôle d'agents provocateurs que jouent visiblement les commissaires de Police dans ces réunions, et du parti qu'essaie ensuite le gouvernement d'en tirer, en vue des élections, par la reproduction inexacte, mensongère, des discussions dans ses journaux, cette conduite m'était imposée comme un devoir civique.

Je la tiendrai encore à l'occasion, coûte que coûte. D'ailleurs, la plupart des dissolutions sont illégales, puisque le loi n'admet que deux cas dans lesquels une réunion puisse être dissoute : 1° quand la réunion devient tumultueuse. 2° quand l'orateur s'écarte du sujet en discussion. Or, les commissaires n'ont jamais jusqu'ici dissous une seule réunion pour ceux deux motifs. Ils les ont toujours dissoutes, dès qu'ils ont vu, dans le langage des orateurs, de l'hostilité contre le gouvernement actuel [...]. Quant au délit d'excitation à la haine et au mépris du gouvernement qui m'est également reproché, je regarde comme le plus saint devoir d'un citoyen, et je le dirai dans ma défense, d'exciter ses compatriotes à toute autre chose qu'à l'amour et à l'estime d'un gouvernement qui manque à tous ses engagements, perd la France, et nous amènera, à notre grande honte, un nouveau Waterloo et une nouvelle invasion [...].

Je suis donc, purement et simplement, sous le coup d'une vengeance policière ; je n'ai point courbé la tête devant deux commissaires de police, l'administration me le fait expier. Ce serait la honte de la France, des journaux indépendants, et de l'opinion publique, si tels abus de pouvoir n'étaient pas au moins flétris [...]

Imprimez cette lettre entière dans Le Liberté. Demandez chaque jour énergiquement notre liberté jusqu'à ce que vous l'ayez obtenue".

En haut de la lettre, Émile de Girardin a noté : "constater le fait des 17 jours de prison préventive sans interrogatoire".

Vendu